Les couples descendent du bus.
Polly et Tim sont suivis de Jean et Marine.
Harry et Dikembe sont les derniers.
Il semble que Moesha ne soit pas venue.
Ils découvrent une petite plage protégée, équipée d'un ponton de bois.
Un second véhicule, déjà présent, est chargé de matériel de plongée.
Miranda se tourne pour leur parler.
― Impossible d'apprécier notre île sans découvrir les trésors marins. Qui d'entre vous a envie de plonger? Pour ceux qui veulent juste un masque et des palmes et rester près du bord, il y a tout ce qu'il faut…
Jean, qui semble s'y connaître, vérifie le matériel disponible.
― Vous êtes certifié? demande le préposé, un beau jeune homme bien musclé.
― Depuis que j'ai douze ans, frime Jean. Mon père avait une maison au Cap Ferrat.
― Désolé, monsieur… Je ne sais pas où c'est.
― Vous êtes né sur l'île?
― Oui, monsieur.
― Un vrai coup de chance, s'enchante Jean. Je vous souhaite que ça dure longtemps…
Le préposé ne réagit pas au commentaire vaseux.
Dikembe approche à son tour pour étudier le matériel.
― J'ai remarqué que votre femme n'est pas avec nous, commente Jean.
― Ouais, répond le basketteur d'un ton maussade. Elle est partie… C'était pas son truc, ici.
― Je comprends… Ce n'est pas du goût de tout le monde, persifle Jean.
― Non.
― Elle n'aura pas essayé, quoi? insiste Jean, lourdement.
― Non, bougonne Dikembe.
― Elle est partie comment?
― Elle a pris l'hydravion du soir.
Jean hoche la tête avant d'ajouter:
― Dommage pour vous… Ici, c'est peut-être mieux d'être à deux… Pour partager l'expérience. Avoir un témoin…
Jean se tourne vers Marine qui, déjà en maillot de bain, essaie un masque pour le snorkeling.
― Ouais… Peut-être bien, répond mollement le sportif. Pourtant le petit vieux, ça n'a pas l'air de le déranger.
Les deux hommes se tournent vers Harry Hathaway qui installe son fauteuil pliable en bordure d'eau.
Jean se remémore la conversation de la matinée.
― Ouais, lui… C'est vraiment un mec à part, commente-t-il, évasivement.
Le basketteur s'éloigne de Jean.
Miranda arrive à ses côtés.
Elle enfile sa combinaison de plongée.
― Vous plongez avec nous? lui demande Jean.
― Je suis votre guide sur terre… Sous la mer et… Dans les airs...
L'insinuation, à tonalité sexuelle, amuse Jean.
À son tour, il commence à se préparer.
*
Sous l'eau, un groupe de quatre plongeurs: Jean, Dikembe, Tim et Miranda.
Ils sont vêtus de combinaisons blanches.
Leurs masques et leurs palmes sont noirs mais leurs bouteilles d'oxygène sont dorées.
Ils traversent de nombreux bancs de poissons exotiques aux couleurs variées.
Le site de plongée est véritablement exceptionnel.
Miranda, qui a pris les devant, leur fait signe de la suivre.
Plus loin, mais à profondeur raisonnable, ils découvrent l'épave d'un navire de l'époque de la navigation à voiles.
Les poissons colorés nagent partout autour.
Jean se sépare du groupe.
Il explore divers espaces.
Il regarde par une lucarne.
Un reflet attire son œil.
Un objet brillant est enfoui dans le sable…
Jean cherche un accès mais la vieille porte est bloquée.
Il fait le tour du vaisseau et trouve un passage dans la coque.
Un long couloir sombre.
Un dédale d'obstacles.
Grâce à la lampe sur le haut de son masque, il trouve le bon chemin.
Il pénètre un espace clos qui ressemble à la cabine du capitaine.
Il cherche l'objet vu du pont.
Il voit le reflet.
Il s'en approche.
Il dégage le sable à la main et découvre une grosse clé en or.
Il la loge dans sa ceinture.
Pour sortir, il tente de pousser la porte bloquée.
Elle s'ouvre assez facilement de ce côté.
Il nage ensuite vers Miranda.
Il lui montre la clé.
Elle lève les pouces.
Curieux, les deux autres hommes se sont approchés.
Une clé, pour ouvrir quoi?
Jean leur indique des directions à explorer.
Chacun cherche de son côté.
Après quelques minutes, le geek leur fait de grands signes.
Jean se déplace rapidement vers lui.
Un peu à l'écart de la coque, Tim a découvert un squelette d'homme, partiellement habillé de lambeaux de cuir avec un tricorne sur le crâne.
Il tient dans ses bras un petit coffre.
Jean arrive sur le lieu.
Découvrant la scène, il montre sa clé aux autres.
Dikembe répond d'un signe négatif.
Sans ménagement, le basketteur prend le coffre des bras du squelette qui s'écroule en un tas d'os.
Tous décident de remonter.
En bordure de la belle plage, Marine et Polly pataugent en bavardant lorsque les plongeurs remontent brusquement.
Harry Hathaway est toujours dans son fauteuil pliable.
Il a les pieds dans l'eau.
Il fume un cigare.
Intriguées par le retour des plongeurs, les deux femmes s'approchent du groupe.
En tête de file, Dikembe élève le coffre au-dessus de lui comme un trophée.
― Regardez ce qu'on ramène, jubile-t-il.
Les plongeurs se défont rapidement de leurs bouteilles, masques et palmes.
Tous se regroupent autour d'un carré de sable fin, à l'exception de Harry qui préfère continuer de fumer tranquillement.
Le basketteur dépose le coffre sur le sable.
― C'est moi qui ai trouvé la clé, déclare fièrement Jean à Marine.
― C'était bien? demande-t-elle.
― C'était merveilleux… Je n'ai jamais vu ça! Et de trouver un trésor, en plus…
― À vous, Jean, suggère Miranda.
Heureux comme un gamin, Jean s'agenouille devant le coffre. Il introduit la clé dans la serrure mais peine à faire tourner le mécanisme.
― Vous pensez que c'est plein d'or? demande Polly.
― On verra bien, lui répond Marine.
Jean peine à faire tourner la clé.
― Je vais le faire, déclare Dikembe.
― C'est moi qui ai trouvé la clé… C'est à moi de le faire, grogne Jean, en redoublant d'effort.
― J'ai trouvé le coffre, affirme Tim. Ça compte pas pour du beurre!
Fière de lui, sa jeune compagne se colle à lui.
Elle l'embrasse sur la joue.
Tim glisse une main à l'arrière de son maillot.
Polly se laisse caresser.
Jean lève le nez vers le jeune couple.
L'américain est bien bâti.
Il fait moins mièvre sans ses lunettes et avec ses cheveux décoiffés.
Polly sourit à Jean.
Ses yeux sont chatoyants.
De nouveau concentré, Jean y va de toutes ses forces.
Il parvient enfin à faire tourner la clé.
Sans hésiter, il ouvre le couvercle.
À l'intérieur, il n'y a qu'un crâne humain.
― Putain, c'est quoi ça? s'exclame-t-il.
Jean s'en empare.
Il l'observe sous plusieurs angles.
Il est blanc, sans maxillaire inférieur, avec quelques dents manquantes.
Plutôt effrayant…
― Pourquoi garder un crâne dans un coffre? demande Polly.
― Avec ces pirates, qui peut savoir? répond Dikembe.
― C'était peut-être le crâne de son ennemi, propose Marine.
― Ou de sa femme adorée, rigole Jean.
― On peut le garder? demande le basketteur à Miranda.
― Oui… Si vous voulez, répond la jeune guide. Ou bien, vous me laissez le remettre comme il était.
Sans hésiter, le basketteur l'arrache des mains de Jean.
― Je crois que j'aimerais bien le garder, déclare-t-il. C'est le genre de truc qui me parle…
Personne ne s'y oppose.
― Très bien… Alors, des boissons pour ceux qui ont soif, annonce Miranda gaiement.
Tous se redressent.
Une belle table est installée avec des coupes et du champagne.
Le préposé attend pour les servir.
De nouveau habillés, une coupe de champagne à la main, les vacanciers font plus ample connaissance.
Marine parle avec Dikembe.
Tim parle avec Harry.
Jean, avec Polly.
Habillée très léger, elle présente une sexualité de jeune femme très attirante.
― Drôle de choix de destination pour une lune de miel, commente Jean.
― Nous ne sommes pas mariés… Tim est juste un fan qui voulait me faire plaisir.
― Un fan?
― J'ai une présence dans les médias.
― Vous êtes influenceuse, je parie.
Polly sourit.
― Oui, c'est un peu ça, ajoute-t-elle.
― Ma femme est actrice.
― Je sais. Et vous… Vous êtes français et vous avez beaucoup, beaucoup d'argent.
Les yeux de Polly brillent de vénalité.
― Personne n'est parfait, s'amuse Jean.
Polly sourit.
Elle boit un peu de champagne et lèche sa lèvre sensuellement.
Miranda vient briser le moment.
― Nous allons rentrer, si vous le voulez bien…
― Oui, c'est le bon moment, commente Jean, en déposant son verre sur le plateau doré.
Polly s'éloigne pour aller retrouver Tim.
― C'était une belle mise en scène, déclare Jean à Miranda. Vous pensez à tout… C'était qui le crâne?
Miranda le regarde au fond des yeux.
― Je ne sais pas… Peut-être, l'homme que vous avez mangé.
Jean sourit d'incrédulité.
Amusée, la jeune femme s'éloigne vers le bus.
*
La nuit est tombée.
Sur la terrasse du bungalow, Jean et Marine sont attablés.
À la lueur des bougies, Jean mange avec appétit. Marine sirote son vin.
― Quelle belle journée, s'exclame-t-il entre deux bouchées. Ça t'a plu, ma chérie?
― Oui… C'était bien.
― Tu ne manges pas?
Marine fait la moue.
― En fait, ce qu'ils nous servent là, déclare-t-elle. C'est les restes d'hier…
― Ben… Oui, c'est certainement le cas… La cuisson est pourtant très différente… La sauce aussi… Moi, j'adore.
Marine continue de boire.
― Et le vin, poursuit Jean. T'as remarqué le vin?
Une bouteille de vin rouge trône sur la table.
― Il est correct, commente Marine.
― Un Château Petrus de 1933… Nous buvons un trésor, ma chérie.
― Décidément, on trouve des trésors partout, par ici, ironise Marine.
― Une bouteille comme ça, ça coûte des milliers… Savoure-le plutôt que de le descendre comme un Beaujolais.
― C'est probablement une étiquette collée.
― T'arrête un peu de douter de tout… Laisse-toi emporter. C'est les vacances, putain!
― Justement, tout ici me fait penser à un parc d'attractions… Imaginé pour exciter des gens qui ont déjà tout fait… C'est comme à Disneyland Paris… Tu sais, le manège avec les pirates que les filles aiment tant.
― Mais, non… Ici, c'est la vraie nature, c'est tout. C'est plutôt nous qui ne savons plus ce qui est vrai… Quand on nous met de l'authentique dans nos assiettes, nous ne savons plus l'apprécier. D'ailleurs, Harry me fait l'effet d'être un véritable écologiste. Ça m'étonnerait qu'on puisse le berner.
― T'as parlé à Hathaway?
― En passant… Un peu zinzin, comme tous les mecs fortunés de son âge, mais très correct... Il a très envie de protéger l'île.
― Elle est peut-être à lui.
― Non… Je ne pense pas… Quoique, c'est possible avec son blé… D'où son envie de vouloir protéger le site… Parce que… Un coin pareil, la plupart des mecs t'auraient déjà bétonné tout ça, avec un Sofitel dégueulasse en plein milieu… Il est très intéressé par la préservation naturelle, justement… De nos jours, ce genre de nature… C'est très rare.
Marine fait la moue.
Jean pointe sa fourchette vers l'assiette de sa femme à peine entamée.
― Dis-voir… Tu vas terminer? La plongée, ça m'a rudement creusé…
Marine pousse son assiette vers lui.
Elle reprend du vin.
― On ira boire un coup sur la plage, après? lui demande Jean, en affichant un air un peu canaille.
― Non, pas ce soir… J'ai mal à la tête.
Jean grimace de déception.